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La souveraineté est toutefois jugée essentielle par un grand nombre de citoyennes et de citoyens pour garantir la survie et l'épanouissement de cette culture unique en Amérique du Nord.
Par ailleurs, le Québec devrait jouer un rôle actif auprès des communautés francophones et acadiennes hors-Québec, en instaurant avec elles des relations multilatérales de collaboration et d'échanges susceptibles de sauvegarder leur patrimoine commun et de l'enrichir des particularismes culturels de chacun.
La Commission de Montréal a fait état de la situation fragile de la langue française dans la métropole où se trouve concentrée la très grande majorité des anglophones et des allophones du Québec. Montréal constitue la porte d'entrée naturelle pour les immigrants qui arrivent au pays et 70 % d'entre eux s'y installent définitivement. C'est donc à Montréal, à ses institutions, à son réseau scolaire et à ses entreprises que revient la responsabilité d'intégrer harmonieusement les nouveaux arrivants à la société québécoise, à sa langue et à sa culture.
À Montréal, le vieillissement de la population, la dénatalité et l'exode des jeunes ménages francophones vers les banlieues posent de sérieux problèmes à l'intégration des nouveaux arrivants. Langue continentale de l'Amérique du Nord et gage de mobilité, l'anglais continue d'exercer sur eux une grande attraction. Nonobstant les gains obtenus depuis l'adoption de la Charte de la langue française en 1977, la proportion de ceux qui utilisent le français comme langue d'usage diminue progressivement sur l'Île de Montréal et se maintient à peine au-dessus des 50 %. La prédominance et l'épanouissement du français à Montréal sont donc loin d'y être assurés de façon définitive si les tendances observées jusqu'à présent devaient se maintenir.
La communauté anglophone
Le respect des droits de la communauté québécoise
d'expression anglaise est une attitude largement partagée par l'ensemble
des intervenants de toutes les régions du Québec. Ces derniers
estiment important d'accorder à la communauté anglophone les
garanties nécessaires à la préservation de ses droits
historiques. Peu nombreux ont été ceux qui ont
suggéré au gouvernement du Québec d'accorder à la
communauté anglophone québécoise des droits
symétriques à ceux que les gouvernements des autres provinces
canadiennes accordent à leurs minorités francophones.
La majorité des commissions reconnaissent, dans leurs rapports, la contribution importante de la communauté anglophone à l'édification de la société québécoise, au plan culturel, social, économique et politique. Elles proposent donc, à l'instar de l'avant-projet de loi, que la constitution d'un Québec souverain garantisse clairement les droits historiques de la communauté anglophone.
Les nations autochtones
Dans la situation actuelle, la question autochtone apparaît beaucoup plus
complexe et délicate à traiter. Elle a été
largement abordée lors de la consultation, souvent même avec
émotion par plusieurs intervenants. Deux visions se sont
manifestées. D'une part, la perception de ceux et celles qui jugent les
autochtones trop revendicateurs et trop gâtés par le gouvernement.
D'autre part, la vision de ceux et celles qui estiment les revendications
autochtones justifiées compte tenu des injustices dont ils ont
été l'objet par le passé de la part d'autres
Québécoises et Québécois. Les points de vue sont
assez confus sur le sujet et généralement
caractérisés par une information insuffisante. Une
majorité d'intervenants seraient d'avis qu'il faut reconnaître les
droits des autochtones. La reconnaissance de ces droits ferait d'eux des
citoyennes et des citoyens à part entière du Québec. Ils
pourraient alors se prévaloir des mêmes avantages et seraient
astreints aux mêmes obligations que tous les autres citoyens du
Québec. Les réserves seraient abolies et des gouvernements locaux
seraient instaurés. Bref, les autochtones deviendraient contribuables et
partenaires à part entière de l'économie et de la vie
québécoise. Position qui, une fois analysée sous l'angle
des revendications autochtones, fait ressortir une grande ambivalence. Si tous
s'entendent pour dire que les relations avec les autochtones font
problème et que la situation doit être rapidement
réglée, on a par ailleurs l'impression que le gouvernement
piétine et tarde à proposer des solutions.
Généralement, les commissions pensent que les relations avec les autochtones doivent être établies dans le cadre du respect de l'autorité du Québec, de sa constitution et de l'intégrité de son territoire. Le gouvernement doit favoriser la coexistence harmonieuse, dans le respect des droits des autochtones aussi bien que ceux de la collectivité québécoise, de même que la responsabilisation des autochtones et leur intégration à l'économie du Québec. La Commission de la Côte-Nord demande aussi que le gouvernement dévoile publiquement l'offre faite aux communautés montagnaises de la Côte-Nord et qu'il consulte la population nord-côtière avant de conclure une telle entente.
Compte tenu de la grande complexité de la question autochtone, plusieurs intervenants ont souligné la nécessité de mettre de l'avant une meilleure politique d'information de la population. Les commissions invitent donc le gouvernement à préparer et à diffuser des informations pertinentes concernant les droits ancestraux des autochtones, leurs revendications et les règles du droit international qui s'appliquent à leur situation. Elles invitent également le gouvernement à expliciter et à préciser sa propre vision des rapports Québec-autochtones.
Les communautés culturelles
Selon plusieurs témoignages, la présence des communautés
culturelles est source d'enrichissement pour la société
québécoise. Tous souhaitent voir les membres de ces
communautés s'intégrer à la culture et à la vie du
Québec. Pour y parvenir, l'État doit soutenir les immigrants, en
leur fournissant les outils indispensables à leur intégration,
tout particulièrement les services qui concernent l'apprentissage de la
langue française et l'initiation à la culture du Québec,
afin qu'ils puissent rapidement établir des relations harmonieuses avec
leurs nouveaux compatriotes. La connaissance de l'histoire du Québec est
jugée essentielle également pour réaliser cet objectif de
compréhension mutuelle et d'intégration.
L'idée de << régionaliser l'immigration >>, c'est-à-dire de favoriser l'établissement des nouveaux arrivants dans des régions autres que la région métropolitaine, a été reprise par plusieurs intervenants.
La citoyenneté
L'acquisition de la citoyenneté, telle que présentée dans
l'avant-projet de loi, soulève de nombreuses questions. Quel sera, par
exemple, le statut des Québécoises et des Québécois
qui demeurent à l'extérieur du Québec au moment de
l'accession à la souveraineté ? Quel sera le statut des enfants
nés à l'étranger mais de parents québécois ?
Quelles seront les modalités d'acquisition de la citoyenneté
québécoise pour les futurs immigrants ?
Certaines commissions estiment également que les dispositions de l'avant-projet de loi concernant la citoyenneté souffrent d'une lacune importante en ne prévoyant pas de statut pour les Québécoises et les Québécois qui demeureront à l'extérieur du Québec lors de l'accession à la souveraineté. Diverses propositions conférant une portée plus ou moins étendue aux règles d'attribution de la citoyenneté ont donc été formulées en ce sens. En outre, des recommandations ont été suggérées concernant certains cas particuliers : renonciation volontaire à la citoyenneté québécoise, admission des étrangers sur le territoire, attribution de la citoyenneté aux personnes qui détiennent le statut de résident permanent.
Enfin, la Commission de Montréal recommande, en premier lieu, de remplacer le concept de la << citoyenneté >> par celui de la << nationalité >>. En effet, la << nationalité >> se définit comme le lien juridique qui unit un individu à un État et réfère à l'identité d'une communauté d'individus habitant un territoire donné. Ce terme semble préférable à la notion de << citoyenneté >> qui découle de la situation historique du Canada au sein de l'Empire britannique. De plus, l'utilisation du concept de << nationalité >> pourrait permettre d'éliminer les différences, maintes fois évoquées, entre les Québécois d'origine française et anglaise et les nouveaux Québécois issus d'autres pays.
Le territoire
Le maintien de l'intégrité territoriale du Québec demeure
une préoccupation centrale : aux yeux des intervenants, le Québec
doit absolument conserver ses frontières actuelles.
L'appréhension d'un démembrement partiel en faveur des nations
autochtones a été fréquemment évoquée lors
des audiences. On s'interroge alors sur la possibilité de concilier le
maintien de l'intégrité territoriale avec la reconnaissance du
droit des autochtones de << se gouverner sur des terres leur appartenant
en propre >>, droit prévu à l'article 3 de l'avant-projet
de loi.
Ayant pris bonne note de ces inquiétudes et interrogations, les commissions appuient, de façon générale, l'article 4 de l'avant-projet de loi. Elles recommandent toutefois au gouvernement de rendre plus accessible l'information relative à la notion d'intégrité du territoire en diffusant, notamment, les études réalisées sur cette question dans le cadre de la Commission Bélanger-Campeau et de la Commission d'étude des questions afférentes à l'accession du Québec à la souveraineté.
La question du Labrador a été soulevée à maintes reprises. Plusieurs s'interrogent encore sur la possibilité, pour le Québec, de récupérer ce territoire, qui lui a appartenu jusqu'en 1927. D'autres estiment que le Québec peut et doit le faire. Quelques commissions, dans leur rapport, demandent au gouvernement de ne pas abandonner les revendications sur le Labrador et de faire réviser la frontière entre le Québec et les Territoires du Nord-Ouest afin que les îles du littoral soient rattachées au territoire québécois.
Le partage des eaux territoriales et intérieures, les limites des zones de pêche, l'espace aérien du Québec, l'arbitrage des litiges lors des négociations avec le Canada et les mécanismes de surveillance du territoire québécois font aussi l'objet de préoccupations.
La continuité des lois
L'accession du Québec à la souveraineté ne doit pas
provoquer de vide juridique. Toutes les mesures nécessaires doivent
être prévues pour que le gouvernement du Québec puisse
prendre immédiatement la relève du gouvernement
fédéral afin qu'il n'y ait pas d'interruption dans les services
offerts à la population.
Ce thème n'a pas fait l'objet de très grands débats dans la population, mais il a néanmoins suscité certaines questions. Quel sens précis donne-t-on au terme << continuité >>? Quelles seront les conséquences de la souveraineté sur les services présentement assurés par le gouvernement fédéral ? Comment le Québec assurera-t-il cette continuité et à quel coût ? La capacité financière du Québec sera-t-elle en mesure d'y répondre ? Cette << continuité des lois >> implique-t-elle la poursuite intégrale des programmes et des services déjà existants ?
Deux sujets ont particulièrement retenu l'attention lors des audiences. En effet, ce qu'il adviendra des prestations actuellement versées par le gouvernement fédéral et la priorité d'emploi des fonctionnaires fédéraux dans un Québec souverain ont été la source de nombreuses interventions.
Ce constat a donc amené la majorité des commissions à recommander qu'on inscrive, dans l'avant-projet de loi, des dispositions supplémentaires visant expressément le maintien d'un régime d'assurance-chômage et de l'ensemble des prestations fédérales actuelles, notamment les prestations fiscales pour enfants et les pensions des anciens combattants.
Une commission est allée encore plus loin en recommandant au gouvernement d'analyser immédiatement et de façon précise tous les programmes dont il entend assurer la continuité et d'en informer la population du Québec, en expliquant les mesures transitoires qui seront mises en place au lendemain de la souveraineté.
Par ailleurs, la qualité de dernière instance accordée à la Cour d'appel du Québec, jusqu'à l'institution d'une Cour suprême québécoise, a soulevé des questions. Ces magistrats, en effet, sont nommés par le gouvernement fédéral. Qu'arriverait-il, alors, si cette cour de dernière instance en venait à juger illégal le projet de loi ? Certains recommandent donc au gouvernement du Québec de stipuler dans la loi que, dès son entrée en vigueur, les jugements de la Cour d'appel pourront faire l'objet d'un pourvoi devant la future Cour suprême du Québec lorsque cette dernière sera créée.
Jugeant l'article 12 de l'avant-projet de loi incomplet, une autre commission estime qu'il y a lieu d'en étendre la portée aux tribunaux administratifs et à leurs membres.
Les syndicats de fonctionnaires fédéraux réclament actuellement du futur gouvernement d'un Québec souverain ce que le gouvernement fédéral n'est plus en état de leur garantir, soit la sécurité d'emploi et le maintien intégral de leurs conditions de travail actuelles et ce, à l'heure même où le gouvernement fédéral entend couper 45 000 postes dans sa propre fonction publique. Ces divers constats ont amené une commission à se demander comment il était possible, dans les circonstances, d'exiger du Québec qu'il fournisse de telles garanties ? Cette commission recommande toutefois que le gouvernement fasse tout en son pouvoir pour que la transition se fasse harmonieusement.
Dans chaque région, mais principalement dans celle de l'Outaouais, on demeure donc soucieux de l'impact économique et administratif de la transition. On réclame, là aussi, des informations plus précises et des scénarios de changement.
Dans leurs rapports, la plupart des commissions demandent toutefois au gouvernement du Québec d'assurer de manière générale l'intégration de tous les employés fédéraux à la fonction publique québécoise.