Rencontre avec le dramaturge Michel Tremblay

propos recueillis par Luc Boulanger

Son monde, c'est le Plateau Mont-Royal des années soixante, un quartier populaire de Montréal habité par les laissés-pour-compte de la société québécoise : des femmes qui rêvent de liberté, seules dans leur cuisine; des travelos qui tapinent au coin d'une rue en attendant le prince charmant; d'éternels enfant perdus dans le monde des grands... Un monde très local qui, pourtant, fascine, le monde entier.

Dramaturge québécois le plus joué dans le monde, Michel Tremblay a vu ses pièces montrées dans dix-huit pays, dont les États-Unis, la Grande-Bretagne, la France, l'Allemagne, la Finlande, l'Australie, l'Italie, la Hollande, la Suède, le Brésil, et le Zaïre. La presque totalité de son oeuvre dramatique et trois de ses romains sont disponibles en anglais. La pièce qui l'a fait connaître du grand public en 1968, Les belles-soeurs, a été traduite en dix langues, dont le yiddish et le créole.

Comment expliquer un tel suucès? "Ce n'est pas le sujet qui fait l'universalité d'une oeuvre, mais la qualité de l'écriture," explique Michel tremblay. "Si une pièce est bonne, elle est universelle; si elle est mauvaise, elle est oubliée."

"Tous les écrivains parlent d'eux, de leur entourage et de qu'ils connaissent. Le reste n'est qu'affaire de transposition. Proust, Dostoievski ou Tchekhov ont raconté le destin de personnages peu familiers à bien des gens, mais ça nous touche. Il n'est pas nécessaire d'être aristocrate ou carmélite pour comprendre la peine de la duchesse de Langeais qui trouve refuge dans un couvent dans le romain de Balzac".

Au Québec, Michel Tremblay fait "partie de la famille" tant son oeuvre a des résonnances dans le coeur de chacun. Les Québécois aiment la galerie de personnages qui forment l'univers de tremblay. À travers le destin de Carmen, d'Hosanna ou d'Albertine, ils reconnaissent leurs peurs et leur rêves, leurs grandeurs et leur misères.