Monsieur Parizeau a d'abord rappelé que c'est dans la continuité de l'oeuvre de René Lévesque que son gouvernement a abordé ses relations avec les Autochtones. Il a insisté sur la légitimité des droits et des aspirations des Autochtones, au point, a-t-il dit, <<qu'il ne saurait être question de lier leur reconnaissance à l'atteinte d'un autre objectif national, dût-il être aussi élevé que la souveraineté du Québec>>.
Le Premier ministre a ensuite passé en revue les principaux projets mis de l'avant par son gouvernement avec les nations autochtones:
- Avec les Inuit, la négociation en cours vise l'établissement d'un gouvernement autonome au Nunavik. Un consensus a déjà été obtenu sur plusieurs points. En outre, le Premier ministre a mis en marche plusieurs projets qui stagnaient dont la construction d'un centre de formation de la main-d'oeuvre au Nunavik et la construction de deux dispensaires, un à Quaqtaq, l'autre à Inukjuak.- La négociation globale avec les Attikameks et les Montagnais a permis au gouvernement, par le dépôt d'une offre globale, d'exprimer concrètement sa vision de ses relations avec les Autochtones: autonomie et partenariat.
- De plus, une importante entente avec les Cris a été conclue. Elle leur donne l'entière responsabilité de l'administration de la sécurité publique dans l'ensemble de leurs communautés. Cette entente faisait l'objet de négociations depuis des années et n'avait jamais abouti. Des discussions sont présentement en cours avec les Cris sur un projet de protocole d'entente visant à reprendre les négociations sur la poursuite de la mise en oeuvre de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois.
De plus, un conflit vieux de plus de deux ans entre la communauté crie de Waskaganish et des compagnies forestières a été réglé. Enfin, le gouvernement a rapidement mis en oeuvre les ententes conclues avec les Cris d'Oujé-Bougoumou, même si la question des terres n'est toujours pas réglée et que le fédéral n'a toujours pas reconnu la bande. Une entente provisoire sur les services policiers a aussi été signée avec Oujé-Bougoumou.
- La négociation avec les Hurons-Wendat sur la chasse à l'orignal a été réactivée de manière intensive dès le mois de novembre. Une entente a pu être signée en février dernier après l'adoption par l'Assemblée nationale d'une loi en permettant la ratification.
De plus, la négociation portant sur l'autonomie gouvernementale des Hurons-Wendat et sur l'application de ce qu'il est convenu d'appeler le traité Murray va maintenant bon train et une entente-cadre devrait être signée d'ici quelques mois.
- Le gouvernement poursuit la mise en oeuvre de l'entente signée avec les Algonquins de Lac-Barrière, en 1991. Le but de cette entente est la préparation conjointe d'un plan d'aménagement intégré des ressources (forêt et faune) sur un territoire de 10 000 km2. Après des années difficiles où la survie de l'entente a été maintes fois menacée, les travaux se déroulent maintenant normalement et harmonieusement.- Avec les Algonquins de Kitigan Zibi, le gouvernement a renouvelé une entente sur la sécurité publique, selon les termes de la Loi 57 récemment adoptée.
- Une entente semblable a aussi été conclue avec les Naskapis. Avec eux, le gouvernement a également engagé un processus d'échanges portant sur plusieurs dispositions de la Convention du Nord-Est québécois.
- Les Micmacs de Listuguj ayant porté à l'attention du Premier ministre plusieurs sujets qui les préoccupent, un processus de discussions a aussitôt été mis sur pied qui devrait mener bientôt à de véritables négociations, en vue d'ententes concrètes.
- Avec les Mohawks, Monsieur Parizeau a également fait avancer un certain nombre de projets. Ayant constaté, àson arrivée, que plusieurs engagements pris par le Québec dans une entente signée en 1990 avec les Mohawks d'Akwesasne n'avaient pas été respectés, le Premier ministre a rapidement pris les dispositions pour remédier à cette lacune. Cette entente prévoyait la mise en place d'une dizaine d'équipements communautaires essentiels mais les dossiers étaient littéralement bloqués dans les ministères. Monsieur Parizeau a fait dégager les budgets nécessaires dans les ministères concernés afin que le Québec puisse respecter ses engagements. Il s'agit entre autres de 650 000 $ pour un centre communautaire, de 1 350 000 $ pour un centre de formation et de 750 000 $ pour un palais de justice.
En ce qui concerne Kahnawake, une rencontre a rapidement été organisée par David Cliche, adjoint parlementaire du Premier ministre pour les affaires autochtones, avec le chef Joe Norton dès le mois d'octobre. Plusieurs autres rencontres ont eu lieu par la suite entre des représentants de la communauté et du Secrétariat aux affaires autochtones. Elles ont porté surtout sur la taxation et le transport. Le gouvernement a aussi mené une négociation avec Kahnawake pour la création d'un corps policier autochtone. Pour le moment, les Mohawks ont choisi de ne pas ratifier l'entente à laquelle en sont arrivées les deux parties, mais le dialogue se poursuit, de même que les rencontres entre messieurs Cliche et Norton.
Pour ce qui est de Kanesatake, le Premier ministre a rappelé que malgré la signature d'un protocole d'entente Canada/Kanesatake en décembre dernier, des différends persistent entre ces deux parties, de sorte que la situation évolue lentement. Monsieur Parizeau a réitéré la position du Québec à l'égard de cette communauté, à savoir qu'il n'accepte pas que des ententes touchant les champs de compétence québécois soient signées sans que le Québec soit associé aux négociations.
Puis, le Premier ministre Parizeau a mentionné deux grands dossiers qui lui tiennent à coeur et qui touchent l'ensemble des Autochtones: la création d'emplois pour les jeunes Autochtones et la lutte contre la violence familiale. Qualifiant d'intolérables le haut taux de suicide chez les jeunes Autochtones et le degré de violence qui sévit dans les communautés autochtones, Monsieur Parizeau a déclaré que son gouvernement accorde son entier appui aux communautés et organismes autochtones qui travaillent àcontrer ces fléaux.
<<J'ai demandé au Secrétariat aux affaires autochtones de mettre l'accent sur la création d'emplois pour les jeunes Autochtones, a-t-il déclaré, et d'évaluer différentes possibilités d'agir rapidement avec les moyens existants, dont le tout nouveau programme Impact-Jeunesse mis sur pied par la ministre de la Sécurité du Revenu.>>
Le Premier ministre a réitéré son engagement envers l'Association des femmes autochtones du Québec. Le gouvernement appuiera l'Association qui organise un vaste colloque sur la violence familiale, l'automne prochain à Montréal. Monsieur Parizeau a rappelé que cet événement marquant réunira pour la première fois l'ensemble des ressources et des intervenants avec les chefs et les leaders autochtones.
Comparant l'action du Québec avec ce que fait le gouvernement canadien, Monsieur Parizeau a dénoncé l'inaction du fédéral qui multiplie les études, les enquêtes, les consultations, comme si l'évidence d'agir ne s'imposait pas d'elle-même. Jacques Parizeau s'est indigné de voir qu'après quatre ans de consultations qui nous ont coûté 50 millions $, la Commission royale sur les peuples autochtones a produit des centaines de documents mais qu'elle reporte toujours le dépôt de son rapport final. << Pire, a ajouté Monsieur Parizeau, qu'a fait le fédéral avec les rapports intérimaires de la Commission, dont un sur l'autonomie gouvernementale? Au lieu de prendre position et de tracer la voie, a poursuivi le Premier ministre, le fédéral a annoncé, en janvier 1994, une autre consultation publique sur l'autonomie gouvernementale. Une politique fédérale sur le sujet devait voir le jour six mois plus tard. Eh bien, dix-huit mois plus tard nous attendons toujours.>>
En terminant, Monsieur Parizeau a rappelé que le Québec se classe fort bien au Canada en ce qui concerne l'action envers les Autochtones. Le rapport du professeur Bradford Morse à la Commission Bélanger-Campeau en 1992 a d'ailleurs souligné que la performance du Québec dépasse celle des autres provinces que ce soit au sujet des territoires, des langues autochtones, de l'éducation, de la santé et services sociaux, de la reconnaissance du titre indien et de l'autonomie gouvernementale.
Le Premier ministre a conclu en dévoilant qu'il a l'intention de proposer aux Autochtones de réaliser un engagement pris par René Lévesque et auquel le gouvernement précédent n'a pas donné suite. Il s'agit de mettre sur pied un mécanisme d'échanges permanent entre les nations autochtones et le gouvernement. Ceci afin d'avoir un lieu de discussions sur des questions de fond, comme l'autonomie gouvernementale.
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